L’Abécédaire

Air

L’un des principaux sujets des œuvres de Folon, est un élément qu’on ne peut pas voir : le vent. Pourtant, il est bien là, vecteur d’envol et de liberté. C’est lui qui pousse les oiseaux vers d’autres horizons, c’est lui qui caresse le visage de l’homme au chapeau, seul assis devant la mer et c’est encore lui qui porte l’homme lorsque dans un rêve fou, il quitte la pesanteur terrestre et s’envole en quête de liberté. Mais au-delà du vent, l’air est présent également, source d’équilibre et de légèreté. Un grand nombre de ses œuvres sont parsemées de bulles en suspens ou qui s’envolent créant une sensation d’apesanteur (Ouverture, 1989 ; L’Oiseau bleu, 2002 ; etc.). Enfin, c’est encore dans l’air qu’un funambule de temps à autre se joue de l’équilibre en marchant sur une corde qui bien souvent n’est rattachée à rien (L’artiste, 1982 ; Le funambule, 2002, etc.). Finalement avec son automate (Equilibre, 2000), Folon affirme la rencontre de l’air et de l’artiste.

 

Collage

La matière, l’épaisseur, la troisième dimension interpellent Folon depuis toujours. Avant de se lancer dans la sculpture, Folon trouve le moyen de créer du relief à travers la pratique du collage, en particulier avec ses guitares, ou encore la série des voyages où des morceaux de carton ondulé, de papier ou de tissus évoquent des navires.

L’objet fait en quelque sorte office de trait d’union entre l’espace du spectateur et l’espace de l’œuvre, les réunissant dans une seule et même dimension.

 

Déclaration universelle des droits de l’Homme

C’est à l’occasion du 40ème anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme qu’Amnesty International invite Folon à illustrer une nouvelle édition de cette véritable petite bible encore trop mal appliquée dans la plupart des pays du monde. Et c’est bien parce que « tout le monde en parle et personne ne la lit », que l’artiste accepte de participer à cette cause humaniste, comme il le fait si souvent. Sur les 30 articles qui constituent le texte des Nations Unies, Folon en illustre 20 sans pour autant calquer les mots sous forme d’images. C’est par la métaphore qu’il choisit de nous livrer son interprétation. Comme toujours, Folon parvient à nous livrer un message grave à travers des signes simples et universels, aux couleurs d’une légèreté et d’une douceur qui réveillent chez le spectateur l’espoir plutôt que le tragique. Les images de Folon viennent imprégner nos esprits pour nous inciter à la réflexion, et peut-être, à l’action.

 

Environnement

Nostalgique de la nature que la folie des hommes détruit un peu plus chaque jour, Folon saisit régulièrement son pinceau afin de soutenir les causes écologiques en créant leurs affiches (Aujourd’hui, l’écologie, 1981 ; Greenpeace – Deep deep trouble, 1988 ; Folon, Notre Terre, 1991 ; etc.). L’artiste est engagé. Au-delà de l’aide qu’il apporte aux défenseurs de l’environnement en leur procurant une visibilité, son amour et son respect pour la nature se ressentent dans la plupart de ses œuvres. L’arbre, l’oiseau, la Terre, autant de thèmes récurrents auxquels l’artiste tente de nous sensibiliser pour éveiller en nous le désir de les préserver afin d’éviter de transformer nos forêts en étendues infinies de troncs coupés.

 

Flèche

Signe récurrent, la flèche est au centre de la première exposition importante de Folon à Paris en 1968 (Folon, Galerie de France, 1968). Toute l’aliénation de la ville moderne se concentre dans ce seul symbole qui représente la confusion directionnelle provoquée par l’amoncellement des signes, des sens giratoires, des panneaux indicateurs, qui finalement, bien plus que nous guider, finissent par nous perdre et par nous étouffer. C’est pourquoi dans ses œuvres, les flèches deviennent folles et sautent dans toutes les directions (Un cri, 1970). Pire, elles sont sournoises et s’enroulent autour des villes comme des serpents autour de leurs proies (La Jungle des villes : Monstres, 1971). Finalement, la flèche a envahi le monde jusque dans la tête de ses habitants, jusqu’à en surgir dans tous les sens, montrant que l’homme a atteint le point de saturation : il ne digère plus ni les signes qu’on lui impose ni le trop-plein d’informations qui lui parviennent chaque jour (Le Quotidien, 1978). A d’autres moments, la flèche apparaît comme la voie unidirectionnelle que l’on tente d’imposer à l’homme et dans laquelle il est pris au piège (Le Chemin, 1985). Folon raconte que cette thématique lui est apparue, lorsqu’en cherchant à passer le temps pendant quelques trajets entre Paris et Bruxelles, il commença à compter tous les panneaux comprenant des flèches et finit par en comptabiliser 1268 !

 

Horizon

Dans son désir d’évoquer le voyage et la liberté, Folon développe la thématique des horizons lointains. Ils apparaissent très fréquemment en arrière-plan davantage comme une résultante que comme une thématique intrinsèque (notamment dans ses nombreuses représentations de bateaux naviguant au large). Mais s’ils ne sont pas conscientisés par celui qui regarde, ils agissent néanmoins sur le ressenti en accentuant la sensation de grandeur infinie de l’espace et d’évasion.

 

Humanisme

Folon est un artiste engagé. Son œuvre est imprégnée d’un grand sens éthique. A travers la douceur de ses couleurs, il tente de nous guider vers la voie de la tolérance et de la paix. Car selon lui, « si l’Homme passait plus de temps à admirer la beauté, du monde, d’une œuvre, il en aurait moins à consacrer à la guerre et en oublierait la violence, souvent gratuite, qui l’anime. » C’est pourquoi Folon ne dépeint pas le monde d’une manière tragique. Ses œuvres sont empreintes d’humour ou de poésie car la beauté, au-delà de sa valeur esthétique, a dans son travail une connotation morale. Folon s’élève contre la peine de mort, revendique l’égalité entre les Hommes quelles que soient leur couleur, leur religion ou leur culture, défend les minorités et cela avec un langage accessible à tous : des images, des signes universels et compréhensibles quels que soient l’âge et l’origine du spectateur. C’est pourquoi des organisations comme Amnesty International ont fait appel à lui pour illustrer non seulement leurs affiches (1977, 1986), mais aussi la Déclaration universelle des droits de l’homme (1988), dans l’optique de redonner à l’Homme l’envie de croire en l’humanité. Folon s’engage par ailleurs contre le racisme, qui n’a aucune raison d’être car bien-sûr pour le peintre, « les couleurs sont faites pour se mélanger et pour s’aimer ». Il réalise encore bien d’autres projets parmi lesquels une affiche intitulée Contre la peine de mort (1978), une autre pour le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (1991), pour l’Unesco (1988) ou encore celle des Ve Jeux Olympiques d’hiver pour les Handicapés en 1992 représentant un oiseau aux ailes brisées qui parvient tout de même à voler, soulignant toute la force et la grandeur de ces athlètes.

 

Liberté

Folon est véritablement l’artiste qui a su mettre la liberté en formes et en couleurs. Qu’il la revendique lorsqu’il soutient une grande cause ou qu’il la suggère tout simplement, elle est toujours présente en toile de fond. Tous ses thèmes, tous ses signes en expriment différents degrés. La liberté, chez Folon, c’est celle que gagne un oiseau lorsqu’il sort de sa cage, mais c’est aussi la grandeur infinie des horizons ouverts, un bateau qui s’en va sur la mer, des hommes qui tentent d’aller « dialoguer avec le vent » en s’envolant… Chacune de ses œuvres est un appel à la liberté individuelle, à la liberté de penser et à la liberté physique.

Main

Si la main se fait rarement menaçante, comme lorsque, immense, elle pointe du doigt un homme égaré dans la ville (Quelque part quelqu’un, 1972), elle apparaît plus généralement comme bienfaitrice, protégeant un pays dans le creux de sa paume (Unicef – Les 1000 jardins du désert, 1989), prodiguant le soleil de l’autre main (La Toscane, 1980), et parfois même libératrice comme sur la couverture de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (1988), où elle laisse s’envoler les oiseaux porteurs de messages de paix. Cette grande main, dont on ne voit jamais le reste du corps et qui apparaît aussi souvent tel un présentoir (soutenant un arbre dans Aujourd’hui, 1979, un oiseau dans Dialogue, 1979, etc.), c’est bien-sûr la main d’un démiurge, quel qu’il soit, mais c’est aussi la main de Folon ou encore celle du chorégraphe (Dancers, 1977). Il s’agit au fond de la main du Créateur au sens large.

 

Mer

Au-delà de la thématique du voyage et de la liberté devant l’étendue infinie de l’eau, l’artiste intégra la mer à son œuvre de façon littérale. En imaginant un homme assis dans les vagues, il voulait pouvoir la faire participer au principe de la création, laissant le mouvement éternel des flots perpétuer indéfiniment son travail de sculpteur. L’œuvre ainsi créée, à quatre mains si l’on peut dire, est donc en perpétuelle évolution, présentant une patine différente à chaque instant, et est le véritable témoin de son temps. C’était aussi le moyen de redonner à la nature sa primauté sur l’homme, lui laissant pour une fois, le dernier mot.

Objets détournés

 

Autre source d’inspiration pour Folon : les objets trouvés. Parmi ceux-ci, certains sont détournés de leur utilité première pour être transformés en icônes, en idoles ou en masques comme ce cadenas ou ces appâts pour pieuvres. Folon est un accumulateur ; tel un « chef d’orchestre du hasard », il combine ses trouvailles pour leur redonner vie, ou plutôt une nouvelle vie et une nouvelle fonction. Rien d’étonnant, finalement, à ce que cet artiste belge ait hérité d’une certaine vision du monde surréaliste consistant à séparer un objet de son identité première ou en tout cas de celle que l’on admet communément. Il ne s’agit pas ici de jouer avec les mots ou avec les noms, mais plutôt avec la forme et la fonction. Folon propose au spectateur de retrouver son imagination d’enfant et de transcender le réel en portant un regard différent sur l’objet, même le plus insignifiant. Une prise électrique par exemple, les yeux remplis de poésie, peuvent révéler le visage d’une icône.

Œil

Comme tout ce qui est rond, l’œil est une forme que Folon aime. Il prend d’ailleurs souvent la place du soleil au milieu du ciel, comme si « un créateur inconnu » venait observer le déroulement de notre quotidien (Partir, 1977 ; L’Aube, 1984, etc.). Parfois, l’œil dessiné par Folon reflète une autre image (Quelque part Exposition J.M. Serreau, 1974 ; Europalia France 75, 1975), celle d’un paysage qui se situerait derrière le spectateur… L’artiste s’amuse ainsi à créer un dialogue entre le dessin et celui qui le regarde. Mais l’œil qui est dans l’image, c’est bien-sûr aussi celui du spectateur lui-même, sorte de mise en abîme du regard, de jeu de miroirs. Et si Folon accorde tellement d’importance au regard, c’est parce qu’il sait, en tant qu’affichiste, que c’est d’abord à travers ce sens qu’il faut interpeller les gens pour les faire s’arrêter, regarder et entrer dans l’image si l’on veut les toucher et les inciter à réfléchir.

Oiseau

L’oiseau est l’animal que Folon met le plus régulièrement en images ou en formes. Car celui-ci, grâce à sa symbolique universelle, est un messager. En effet, l’oiseau qui s’envole dans la pureté de sa blancheur est le vecteur idéal des notions de paix et de liberté qui transparaissent dans des illustrations comme celles de la Déclaration universelle des droits l’homme (1988) ou du symbole du Bicentenaire de la Révolution Française (1988). C’est encore l’oiseau que Folon représente, cette fois les ailes brisées mais parvenant toujours à voler, pour illustrer l’affiche des Ve Jeux Olympiques d’hiver pour les Handicapés en 1992, mettant en exergue tous les exploits dont ces athlètes sont capables. Mais quand il ne vient pas illustrer une grande cause, l’oiseau apparaît très souvent comme signe dans sa valeur intrinsèque. Face à la vision d’un oiseau qui s’envole, il y a plusieurs niveaux de lecture : la légèreté, l’opposition ciel-terre, l’invitation au voyage, la liberté… Et lorsqu’il vole dans la tête de l’homme, faut-il y voir la pureté de l’âme, ou un homme qui rêve de voyage. Peut-être s’agit-il du songe fou d’Icare, ou encore d’un prisonnier qui aspire à s’évader… Chacun, selon son expérience, en fera sa propre interprétation. Mais on peut en tout cas y voir Folon lui-même, lui qui a toujours eu envie de « partir dialoguer avec le vent » et pour qui l’oiseau qui s’envole dans la tête est le début de la liberté (L’oiseau dans la tête, 1999).

Personnage

Principal personnage de l’œuvre de Folon, l’homme au chapeau est un héros universel. Né du désir de l’artiste d’animer et de donner une échelle à ses premiers dessins de villes (une déformation professionnelle peut-être puisque avant de quitter la Belgique en 1955, il avait débuté des études de dessin industriel), ce personnage est réduit à sa plus simple expression : deux points à la place des yeux, un trait à la place de la bouche, un grand chapeau qui lui évite de dessiner des cheveux, et enfin un grand manteau bleu qui lui épargne le souci de lui trouver une garde-robe. Et s’il ne nous est pas inconnu ce personnage, c’est parce qu’il nous rappelle d’autres hommes au chapeau, comme celui de Magritte ou encore celui des films de Chaplin. Il y a une universalité de l’homme moyen, du Monsieur Tout le Monde auquel chacun peut s’identifier. Chez Folon, comme il l’était déjà chez ses prédécesseurs, il est le plus souvent empreint d’une profonde solitude, égaré dans les méandres des grandes villes, ou assis tout seul devant la mer, nous rappelant qu’au fond, on est toujours tout seul, en particulier dans notre dialogue avec une œuvre d’art. Il lui arrive cependant de se démultiplier jusqu’à la Foultitude (1969), car c’est bien l’humanité toute entière qu’il représente. Nul n’est plus banal que lui, et pourtant il est capable de tous les exploits, en premier lieu celui de s’envoler. Et cet homme qui s’envole, ne serait-ce pas Folon, ou plutôt son alter ego réalisant son rêve ?

Silence

 

Tout comme l’air, le silence est un sujet que l’on peut difficilement représenter. Il est pourtant bien là dans l’œuvre de Folon, sous-jacent, implicite. En effet, devant la représentation des oiseaux et des hommes qui s’envolent, seul le vent vient siffler dans nos oreilles. Devant l’homme assis seul face à la mer, c’est uniquement le bruit des vagues qui viennent s’échouer à nos pieds que l’on imagine. Quant à cet homme, égaré dans l’immensité des villes modernes, c’est un silence très pesant qui vient alourdir le malaise qui s’en dégage. Certaines œuvres, au contraire, sont extrêmement bruyantes, comme la série La jungle des villes (1971) dans laquelle la folie des flèches vient résonner dans nos têtes. Le silence apparaît enfin en tant que tel dans l’une des illustrations que Folon a faites pour La Déclaration universelle des droits de l’homme (1988), lorsqu’un Général réclame, d’un simple signe et sous un œil menaçant, le silence à un homme bâillonné qui ne fait pas le poids.

 

Tête

Si l’homme au chapeau se retrouve très fréquemment dans son œuvre, il arrive souvent à Folon de cadrer et de ne montrer que sa tête. Il ne s’agit pas de portraits, car l’homme de Folon n’a pas de visage, à peine un trait en guise de bouche et deux points à la place des yeux. Toute l’attention se focalise alors sur ce que cette partie du corps contient : les pensées. Car chez Folon, la tête de l’homme est presque toujours ouverte à l’observation et à l’interprétation, comme s’il la passait aux Rayons X afin que l’on puisse découvrir ce qui se cache sous le chapeau : un oiseau qui s’envole, un homme qui passe, un œil qui observe… Toujours un signe simple qui résume à lui seul une infinité d’idées tout en ouvrant le champ des interprétations. D’autres têtes reviennent fréquemment, sous forme de cylindres ouverts reposant presque toujours sur la main gauche. Contenues dans ces cylindres, les idées de l’homme, comme dans Le monde (1984) où la tête sert de réceptacle au globe terrestre et dont la paroi est constellée d’étoiles. Parfois, les idées vont jusqu’à surgir de la tête, notamment dans l’aquarelle intitulée Les amis (1989), où toute une série de paires de mains multicolores se serrent en s’envolant dans tous les sens et en emportant avec elles un message de paix universelle. On peut bien-sûr voir dans toutes ces têtes une représentation de l’état d’esprit de Folon au moment où il tient son pinceau, comme dans cet Autoportrait (1987) où huit oiseaux volent dans une tête vue de profil, mais la lecture ne peut s’arrêter là. Il s’agit surtout d’une invitation à réfléchir au processus de signification ou d’une passerelle pour inciter à penser, à rêver.

Valise

Si la valise est un motif redondant dans le travail de Folon, c’est qu’elle lui permet d’illustrer avec une grande originalité les thématiques qui lui sont chères : le départ, le voyage, la liberté. Avec une grande originalité en effet, car il utilise très souvent l’espace créé par la forme du bagage comme cadre à son dessin. Il remplit littéralement la valise du voyage qu’il a fait (Lointains, 1986-87 ; La route, 1988, etc.), des lieux qu’il a visités et des souvenirs qui en ont été engrangés (Landscape Memory, 1982 ; Une ville, 1986, etc.). On la retrouve même dans la Déclaration universelle des droits de l’homme (1988), où elle apparaît comme une fenêtre de prison dont on aurait scié les barreaux centraux et s’ouvrant vers un horizon ensoleillé. Elle représente l’espoir du prisonnier et la liberté de tout homme qui en a le besoin de chercher l’asile dans un autre pays.

Ville

Quoi de plus évident pour un artiste, affichiste de surcroît, d’être sans cesse préoccupé par la ville. Et c’est sans doute parce qu’on lui a inculqué pendant ses années d’étude une technique fastidieuse de dessin, où chaque brique doit être identique à la précédente, agressive avec ses angles qui coupent, que la ville est restée pour Folon une obsession. La ville, c’est le super-signe, celui qui englobe tout. En effet, la ville moderne fait peur à l’artiste, elle est trop grande, morte. Dans les villes de Folon, tout peut être fait de briques, même les arbres, même la neige qui tombe en Décembre (1973), même les hommes (Vivre en ville, 1971). Cette ville menaçante où l’homme semble totalement égaré, pris au piège comme dans une impasse, étouffé sous l’amoncellement des flèches et des panneaux indicateurs, c’est la ville telle que Folon imagine qu’elle sera demain, résultat de la folie des hommes qui massacrent la nature en toute impunité. On peut donc y voir un cri, une critique de la société actuelle, mais également une mise en garde contre ce qui nous attend dans un avenir proche, si l’on ne fait rien pour y remédier.

Voyage

Le voyage est l’un des grands thèmes de l’œuvre de Folon. Et pour l’illustrer, une série de signes récurrents, tels la valise, le bateau et la mer. Si certaines de ses images parlent du voyage littéralement, comme la série des collages de morceaux de caisses d’oranges et autres bouts de carton ondulé en tout genre, dont la forme évoque des bateaux naviguant au large, la plupart de ses œuvres sont une métaphore du départ, de l’évasion en général, comme ces oiseaux qui toujours s’envolent, cette voiture sur la route (On the road, 1983), ou ces valises servant de cadre à une autre image (Lointains, 1986-87 ; La route, 1988, etc.). Plus que de représenter le voyage, l’artiste l’a véritablement intégré à son œuvre, notamment dans la série des 8 sérigraphies Je vous écris (1988) dans lesquelles une carte postale, provenant des Etats-Unis, de Chine, du Japon ou de Grèce, est le point de départ du tableau. La correspondance est une opportunité supplémentaire pour Folon de s’exprimer comme il aime le faire, par le dessin.  Le principal bénéficiaire de son inspiration épistolaire est son ami Giorgio Soavi à qui il envoie des lettres dont les enveloppes sont systématiquement de petites œuvres d’art, inspirées par le timbre qui y était apposé. Le timbre, du reste, est une affaire que l’artiste connaît bien puisqu’il en réalisa lui-même quelques-uns, notamment pour les Nations Unies en 1998, sur lesquels il reprend certaines des illustrations qu’il avait conçues pour la Déclaration Universelle des droits de l’homme, pour l’Europe, pour les Ve Jeux Olympiques pour les Handicapés en 1992, où l’on retrouve le symbole de l’oiseau aux ailes brisées, ou encore en 1988 à l’occasion du Bicentenaire de la Révolution Française.

En définitive, ce que Folon propose au spectateur devant chacune de ses œuvres, c’est de faire un voyage intérieur empreint de poésie, un voyage spirituel vers ses propres souvenirs et ses propres rêves.